Qui aurait pu penser que la Ville de Paris, se voulant plus verte que les écolos patentés, autorise un Grand Prix automobile au cœur même d’un des plus prestigieux quartiers : les Invalides ?

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Pourtant cet événement, impensable encore il y a quelques années, a bien eu lieu. Avant de parler de ce Grand prix de Formule E (pour électrique), comptant pour un championnat du monde organisé par la très honorable FIA (Fédération Internationale de l’Automobile), nous souhaitons en présenter la genèse et en préciser les règles.

Comprendre cette nouvelle formule

Quand voici trois ans, un promoteur astucieux bien en cour à la FIA imagina l’organisation  d’un championnat du monde de monoplaces électriques, beaucoup d’observateurs se gaussèrent en prédisant un échec assuré. Effectivement, les obstacles semblaient insurmontables avec des batteries aux capacités limitées en regard des performances requises ( plus de 220 kilomètres/heure en vitesse de pointe) et sans doute du peu d’engouement des spectateurs à voir évoluer sur des circuits classiques des voitures moins huppées que celles de la catégorie reine, la Formule 1.

A cela, les réponses apportées ont déjà démontré leur efficacité. Pour les spectateurs, le pari de disputer les Grands Prix au cœur même des grandes villes a soulevé l’enthousiasme, avec une réponse populaire de grande ampleur. Pour ce qui concerne la fourniture d’énergie à haute dose pendant un temps suffisant, le problème fut contourné astucieusement. A mi-course, chaque pilote doit obligatoirement changer de voiture pour une voiture identique disposant d’une batterie totalement chargée.

Après une première saison, au cours de laquelle tous les engagés disposaient d’autos identiques élaborées par Renault Sport avec des châssis Dallara, des chaînes de traction identiques McLaren, des batteries Williams et des pneus Michelin spécifiques à faible résistance de roulement, la saison 2016 a lancé une vraie compétition industrielle, avant la compétition sportive.

Chaque équipe engagée respecte un cahier des charges techniques particulièrement rigoureux. Contrairement à la saison inaugurale, les dix équipes ont l’autorisation de réaliser leurs propres évolutions sur le moteur, la boîte de vitesse, la batterie et le système de refroidissement. Toutefois la puissance électrique est limitée à 170 kWh (soit environ 270 chevaux) pour la course et à 200 kWh pour les qualifications. Le châssis, comme en 2015 provient de Spark Racing Technology, dont le patron était, jusqu’en janvier 2016, Philippe Vasseur, devenu Team manager chez Renault pour la F1. La coloration française de cette Formula-e s’affirme également avec les pilotes en lice. Nous trouvons sur les grilles de départ quatre français dont la présence dans cette catégorie a du sens pour le public en raison de leur implication sportive automobile au plus haut niveau dans d’autres disciplines.

Formula-e-Renault-e.Dams-ProstNicolas Prost court en championnat du monde d’endurance et défend ici les couleurs Renault e-Dams où son père Alain, quadruple champion du monde de F1, occupe le poste de directeur adjoint.

 

 

Stephane-Sarrazin-Venturi-Formule-EStéphane Sarrazin s’illustre au volant des protos Toyota, également en championnat du monde d’endurance et défend les couleurs monégasques du team Venturi.

 

 

Loic Duval - Dragon Racing - Formule ELoic Duval, après de la monoplace en Formule Renault puis des courses au Japon, est revenu en endurance et roule ici pour l’écurie Dragon Racing.

 

 

Jean-Eric Vergne - DS-Virgin - Formule EEnfin, Jean-Eric Vergne, après la F1 chez Toro Rosso, demeure pilote d’essai Ferrari et a revêtu les couleurs originales de la Marque DS associée à Virgin.

 

 

Piloter au cœur de Paris

Formule-E-Paris-2016Avant d’en venir à la course proprement dite, il convient de souligner combien le fait de pouvoir rouler à Paris n’était pas acquis d’avance. Si Anne Hidalgo, maire de Paris, trouvait un écho à sa volonté de bouter hors de la cité les voitures polluantes pour inciter les « électriques » à s’imposer intra-muros, le choix du quartier des Invalides passait par l’adhésion de la maire du 7ème arrondissement, Rachida Dati (opposition), qui acceptait de faire cause commune avec A. Hidalgo, à condition que Jean Todt Président de la FIA lui en fasse une demande personnelle. Finalement un consensus put s’établir à condition de revêtir la chaussée d’un tapis provisoire de bitume pour ne pas détériorer les chaussées.

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Tout un système de balisage de la piste, avec plots en béton et grillages de protection, était alors installé tout au long des 1930 mètres du circuit, comportant 14 virages et offrant des vues exceptionnelles sur les Invalides.

Il faut bien reconnaître que c’est cette détermination à vouloir courir au cœur des villes les plus célèbres et emblématiques qui assure une partie du succès de cette Formula E, qui a déjà posé ou posera  cette saison, ses stands au cœur de : Pékin, Mexico, Berlin, Moscou ou encore Londres.

Bien évidemment, pour la course ayant eu lieu le samedi 23 avril à 16 heures, les plus hautes autorités politiques et sportives, pouvaient se féliciter du côté prestigieux de voir se dérouler une course dans un décor aussi grandiose, sans aucune pollution sonore, ni rejets nocifs.

La course

Les qualifications survenues le matin même de la course, avec une superpole mettant en avant les écuries les plus proches des constructeurs comme Audi, DS, Venturi et Renault, avaient clairement indiqué les pilotes à surveiller, dans l’ordre : Bird (DS-Virgin), Di Grassi (ABT-Audi Sport), Vergne ( DS-Virgin), Sarrazin (Venturi) et Prost (Renault e.Dams).

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Effectivement, la course fut limpide après un envol particulièrement réussi de Di Grassi et une lutte fratricide des équipiers DS-Virgin. Le français Duval (Team Dragon) est contraint à l’abandon. Les changements de voiture apportent un peu de peps au spectacle, surtout que Buemi (Renault) met une très forte pression sur les pilotes de tête, en enchaînant des chronos canons. Dans l’affaire, le coriace Bird (qui s’était déjà touché avec son coéquipier) part à la faute. Un peu plus tard, c’est une sortie de piste du chinois Ma Quing Hua (Aguri), qui déclenchera l’entrée en piste de la voiture de sécurité. C’est ainsi que la course se terminera avec une procession, comme à la parade, avec un Lucas di Grassi impérial et confirmé de manière incontestable comme leader du championnat, à quatre épreuves de la fin.

Classement 1er GP de Paris Formula-e

  1. Lucas di Grassi – ABT Schaeffler Audi Sport
  2. Jean-Eric Vergne – DS Virgin
  3. Sébastien Buemi – Renault e.dams
  4. Nicolas Prost – Renault e.dams
  5. Stéphane Sarrazin – Venturi
  6. Sam Bird – DS-Virgin
  7. Robin Frijns – Andretti
  8. Antonio Felix da Costa – Team Aguri
  9. Bruno Senna– Mahindra
  10. Daniel Abt – ABT Schaeffler Audi Sport

A l’arrivée, les déclarations des deux premiers soulignent bien l’impact de cette première course,  à laquelle assistaient Manuel Valls, Premier ministre, Anne Hidalgo, Maire de Paris, Jean Todt, Président de la FIA, le Prince Albert de Monaco, Rachida Dati, maire d’arrondissement, et Pierre Fillon, Président de l’ACO.

Lucas di Grassi :

On voyait même les gens par les fenêtres. Je pense que tout le monde a apprécié cet évènement. Nous sommes très contents d’avoir Paris dans notre calendrier.

Jean-Eric Vergne :

C’est la course la plus incroyable du calendrier. C’était absolument magique. Nous traversons une période difficile en France et en Belgique : ceci montre la force de ce pays. Je suis très fier.

En conclusion

ePrix Paris Formula E 2016

Quoiqu’il en soit, la compétition électrique est bel et bien en marche. Elle se veut la locomotive d’une transférabilité vers des autos de tous les jours. La présence de Carlos Tavarès, le grand patron de PSA, souligne bien tout l’intérêt des constructeurs pour cette forme écologique de compétition, à laquelle d’autres marques comme Jaguar et BMW par exemple, semblent également s’intéresser.

La réponse d’un public enthousiaste et nombreux (15 à 20 000 personnes), bien que frustré d’être parqué derrière des grillages et de ne pas pouvoir voir de manière globale le circuit, semble valider cette évolution irréversible du sport automobile.

La prochaine étape du Barnum électrique (une semaine de montage et autant pour le démontage ) se fera sur la célèbre Alexanderplatz à Berlin le 21 mai prochain, et on a hâte d’y être !

Alain Monnot

Crédit photographique : Gilles Vitry

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