Chers lecteurs, vous l’avez sans doute déjà compris, je considère les courses d’endurance comme les plus attractives du point de vue du spectacle et les plus utiles pour l’évolution de l’automobile de demain.
La récente course à Spa-Francorchamps renforce encore mes convictions en la matière. Qui aurait pu penser que sur une course de 6 heures, 5 des 6 voitures d’usine connaîtraient des soucis sérieux ? Qui aurait imaginé que la victoire en catégorie LMP2 se joue sur le fil, avec brio pour l’Alpine ?
LMP1 – Une course folle
Nous ne vous infligerons pas un compte-rendu exhaustif de la course, tant elle fut de folie mais évoquerons quelques enseignements sans doute riches de signification en vue des prochaines 24 heures du Mans.
On se souvient qu’à Silverstone, lors de la première course de la saison, Audi vainqueur avait été déclassé pour une question de hauteur de patin de fond plat. Beau joueur, le Docteur Ulrich ne fit pas appel de la décision, laissant donc la victoire à Porsche.
Audi ne semblait pourtant pas la marque la plus fringante en course et pourtant, sans doute par une sorte de justice immanente, c’est elle qui gagne.
Il faut dire que Porsche ayant dominé les essais, on s’attendait à une confirmation en course qui ne vint pas à cause d’un mauvais fonctionnement du système de récupération d’énergie sur la N°2 et des crevaisons, un bris de moyeu et de boîte, sur la N°1.
Alors que l’on croyait Toyota bien partie pour la victoire, car elle avait choisi des pneus plus durs permettant de prendre assez facilement l’avantage en doublant les relais, un accrochage pour l’une et une panne de moteur pour l’autre, ne leur permirent de faire illusion qu’un peu plus de 4 heures durant.
Sur l’Audi N°8 de Lucas Di Grassi, Oliver Jarvis et Loïc Duval, une vérification opportune de l’auto rentrée au stand tandis qu’une voiture de sécurité était en piste, permettait à l’équipage de se rassurer par rapport à un comportement délicat de l’auto et de finalement triompher devant les Rebellion, voitures privées et non hybrides.
On le voit, les grands teams-constructeurs auront encore un peu de pain sur la planche avant de terminer les 24 heures au Mans. Cette quasi incapacité de tenir le quart de la distance début mai, a sans doute de quoi inquiéter les états-majors. Les performances sont bien sûr au rendez-vous mais la sophistication extrême des systèmes hybrides ne semble pas totalement sous contrôle. Voilà bien de quoi apporter tout ce piment si particulier à la seule course de 24 heures de la saison, dont le déroulement aura lieu dans un peu plus d’un mois.
Toyota a sans doute recueilli, malgré l’échec, un élément de satisfaction en effectuant un tour complet en « tout électrique » pour pouvoir figurer au classement final, alors que l’auto était immobilisée au stand par suite de casse du moteur thermique. Toutefois, Porsche, Audi comme Toyota ont quitté le mythique circuit des Ardennes avec beaucoup de questions en suspens.
Dans les autres catégories
Il est évident que toute l’attention se focalise sur la catégorie reine des LMP1, où les Rebellion suisses lorgnent avec gourmandise sur une victoire aux 24 heures. Cet exploit infligerait un camouflet sévère aux constructeurs et récompenserait tous les efforts consentis par ce team privé, exemplaire dans la préparation et la gestion des courses.
En LMP2, la lutte au couteau se traduit par des écarts infimes entre les quatre premiers : tous classés dans le même tour !
Oreca, Nissan et Alpine se disputèrent chèrement les honneurs et l’on assista à des élaborations de stratégies très poussées. Pour les mettre en œuvre, il faut des pilotes certes rapides mais aussi astucieux et parfois un brin « gonflés ». Ce fut le cas de Nicolas Lapierre (Alpine) trouvant un trou de souris sur la gauche pour doubler une voiture plus lente (Ford GT), laissant pantois Felipe Derani sur la Ligier N°31 qui se trouva dans l’obligation de passer à droite un poil plus tard, mais bel et bien dépossédé de sa première place en LMP2.
Ferrari gagne facilement en GT Pro devant Ford mais s’incline de peu face à Aston Martin en Gt Am.
Tous les acteurs de ce fabuleux championnat du monde d’endurance sont repartis sur leurs bases pour préparer les 24 heures du Mans. Simulations, essais, élaboration de plans stratégiques, organisation logistique et humaine vont occuper toutes les équipes sans relâche jusqu’à la journée test du dimanche 5 juin prochain. Nous y serons pour vous, évidemment.
Classement des 6 heures de Spa
- N°8 – LMP1 – Lucas DI GRASSI, Loïc DUVAL, Oliver JARVIS
Audi R18 – 160 tours - N°2 – LMP1 – Romain DUMAS, Neel JANI, Marc LIEB
Porsche 919 Hybrid – 158 tours - N°13 – LMP1 – Mathéo TUSCHER, Dominik KRAIHAMER, Alexandre IMPERATORI
Rebellion R-One – AER – 156 tours - N°12 – LMP1 – Nicolas PROST, Nelson PIQUET JR, Nick HEIDFELD
Rebellion R-One – AER – 155 tours - N°7 – LMP1 – Marcel FÄSSLER, André LOTTERER, Benoît TRÉLUYER
Audi R18 – 155 tours - N°4 – LMP1 – Simon TRUMMER, Oliver WEBB, James ROSSITER
CLM P1/01 – AER – 151 tours - N°36 – LMP2 – Gustavo MENEZES, Nicolas LAPIERRE, Stéphane RICHELMI
Alpine A460 – Nissan – 151 tours - N°31 – LMP2 – Ryan DALZIEL, Luis Felipe DERANI, Christopher CUMMING
LIGIER JS P2 – Nissan – 151 tours - N°45 – LMP2 – Matthew RAO, Richard BRADLEY, Roberto MERHI
Oreca 05 – Nissan – 151 tours - N°43 – LMP2 – Ricardo GONZALEZ, Filipe ALBUQUERQUE, Bruno SENNA
LIGIER JS P2 – Nissan – 151 tours
Alain Monnot
Crédit photographique : Service Presse Michelin / DPPI