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La 84ème édition des 24 heures du Mans est directement entrée dans la légende en mettant en scène un scénario aussi improbable que cruel !

Après une course fantastique mettant aux prises sur un rythme élevé les trois grands constructeurs : Audi, Porsche et Toyota, avec pour seul objectif la victoire finale, on croyait bien que Toyota allait enfin atteindre cet objectif. On se souvenait des secondes places en 1992, 1994, 1999 et 2013 et, toute l’équipe voulait conjurer le sort qui s’était acharné sur elle en 2014 avec une panne de tringlerie de boîte de vitesses.

Brad Pitt avait donné le départ de la course sous la pluie et derrière la voiture de sécurité. Moins d’une heure plus tard, les vraies hostilités étaient lancées et on peut dire, que dans toutes les catégories prototypes ou GT on assista à une guerre aussi totale qu’indécise.

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En LMP1, où les titans de l’endurance partaient à égalité avec deux autos par usine, rapidement Audi laissait apparaître quelques faiblesses par rapport aux Porsche ou Toyota. Entre ces deux dernières équipes, on ne cessait de se s’échanger la première place jusqu’au moment où Porsche semblait fléchir un peu avec sa N°1 victime de surchauffe, mais reprenant la ronde infernale.

A toi, à moi, Toyota, avec ses deux voitures et Porsche, avec la N°2, s’échangeaient la première place au gré du trafic, des ravitaillements et des performances époustouflantes des pilotes.

Les stratèges, bien aidés par les ordinateurs, corrigeaient le tableau de marche en fonction des drapeaux jaunes imposant des ralentissements, ou pour tenir compte du roulage sous régime de voiture de sécurité. Les pilotes enchainaient le plus souvent des triples relais avec les mêmes pneumatiques.

Le ballet des interventions aux stands, parfaitement réglés, régalait les passionnés massés face aux stands. Les trajectoires millimétrées dans un trafic important avec des voitures aux performances inégales, enthousiasmaient un public estimé à 263 500 spectateurs pour ce millésime 2016 !

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Juste incroyable

Tout semblait sous contrôle chez chacun des deux grands rivaux, restant en lice pour la victoire. Porsche en tenaille entre les deux Toyota ne lâchait rien mais ne semblait pas, depuis plusieurs heures, en mesure de contester la victoire à Toyota, plus économe en carburant et ayant effectué deux ravitaillements de moins que la Porsche.

Alors que l’on allait aborder le dernier tour de course, comme dans tous ces grands moments que nous procurent les 24 heures, les écrans de télévision nous dévoilaient les visages des responsables japonais et du staff esquissant un sourire. Puis, subitement, alors que tout le monde guettait les voitures de tête, la Toyota N°5 se mettait à ralentir. On pensait un moment qu’il s’agissait d’une façon de se caler sur la pendule. Mais il était trop tôt, et les visages se tendaient dans le stand Toyota, alors que les yeux s’écarquillaient dans ceux du stand Porsche. Et l’impensable se produisait. Lors du passage sous la pendule, à l’entame du dernier tour, la Toyota de tête venait mourir sur la piste en face de la grande tribune et la voix désespérée de Kazuki Nakajima retentissait dans la radio : « No power ! ». Les restes de sourire dans l’équipe japonaise tournaient à l’expression d’horreur puis aux larmes, alors qu’explosaient la joie et les embrassades à l’intérieur du stand Porsche. Dumas-Jani-Lieb venaient de gagner cette 84ème édition, et la légende du Mans venait d’écrire une nouvelle page de son incroyable saga. La Toyota N°5 agonisante repartait pour un tour au ralenti, trop long pour lui permettre d’être classée et cela permettait à la voiture sœur, la N°6, de prendre la seconde place du podium et à l’Audi N°8 de continuer in extremis la tradition des voitures d’Ingolstadt sur le podium du Mans.

Pour la cérémonie du podium, il nous a semblé que le public n’osait pas applaudir à tout crin Porsche, comme par respect pour le team Toyota, terrassé par autant de malédiction.

Hugues de Chaunac, conseiller très engagé aux côtés de Toyota depuis 1992, débordant de chagrin déclarait : « On rêvait de remporter cette course. On avait aussi un cauchemar, celui de casser à une heure de l’arrivée. Mais pas dans le dernier tour. C’est d’une cruauté totale. On n’arrive pas à réaliser. Nous y étions. Cette course est tellement difficile à gagner. Même le grand patron de Porsche est venu nous voir pour admettre qu’il ne méritait pas cette victoire. »

Cruauté ultime, la N°5 n’ayant pas bouclé son dernier tour dans le temps maximal autorisé ne figure pas au classement !

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Les autres catégories très disputées, elles aussi

Alpine réussit en LMP2 une très belle performance, qui pourra accompagner lancement de la nouvelle voiture de route. Les Bleus remportent la catégorie LMP2 de belle manière, au terme d’une bataille âpre dans une catégorie où les prétendants à la victoire furent nombreux. Ils devancent l’Oreca-Nissan G-Drive numéro 26 et la BR01-Nissan du SMP Racing numéro 37.

Ford n’a pas eu la vie facile face à la Ferrari Risi Competizione, qui a défendu avec panache les couleurs de Maranello après que les deux voitures officielles AF Corse aient abandonné, mais Bourdais et ses coéquipiers Hand et Muller sur leur N°68 raflent la mise pour un retour d’anthologie en GT. La N°68 devance la Ferrari N°82 et la Ford GT soeur N°69. Ford et Ferrari sont décidément indissociables au Mans. Mission accomplie pour Ford, malgré la polémique sur la balance de performance qui a fait rage pendant la semaine.

Ferrari peut se consoler avec un doublé en GTE Am avec les N°62 et N°83. La concurrence a fait un peu illusion mais la dernière partie de course a montré la mainmise des 458 Italia sur la catégorie.

La course des 24 heures a maitrisé une fois de plus tous les codes du suspense. Toyota semblait bien avoir tout juste et c’est Porsche qui capitalise sur une 18ème victoire. Chez Toyota doit-on parler du mauvais film de « La malédiction du Mans » ? En tout cas une fois de plus la légende est en marche.

rédacteur : Alain Monnot | Crédit photos : Gilles Vitry, Thierry Coulibally

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